Quelques heures après la destitution de l'ancien président syrien Bachar el-Assad, l'armée israélienne a lancé une offensive sans précédent qui a permis de s'emparer de nouvelles terres sur le plateau du Golan. Israël cherche désormais ouvertement à mettre en œuvre un plan de zone tampon visant à s'emparer de davantage de territoire syrien, un complot qui se prépare depuis plus d'une décennie. En février 2013, il a été rapporté que le gouvernement israélien avait reçu une proposition de « zone tampon » qui s'étendrait jusqu'à 16 kilomètres à l'intérieur du territoire syrien. Cela constituerait, bien sûr, une violation de l'accord de désengagement de 1974 avec la Syrie, qui prévoyait le retrait d'Israël d'une série de zones du plateau du Golan. Plus tard la même année, les États-Unis, avec leurs alliés Israël et la Jordanie, ont cherché à établir deux zones tampons distinctes dans le sud de la Syrie. La première devait s'étendre de l'ouest de Qatana et de certaines zones de la campagne de Damas jusqu'à la frontière jordanienne, s'efforçant d'éliminer toute présence syrienne du plateau du Golan. La deuxième zone tampon devait s'étendre de Deraa à Jabal Druze, le long de la frontière nord de la Jordanie. Ce plan devait être mis en œuvre par le déploiement de 20 000 soldats américains stationnés en Jordanie. Ce modèle de zone tampon en Syrie devait s'inspirer de la stratégie de la « Bonne Clôture » mise en œuvre pendant deux décennies au Sud-Liban. Bien qu'Israël y ait finalement stationné ses propres forces, il s'appuierait fortement sur les milices locales pour gérer ce système. Bien que qualifiée de stratégie de « zone tampon », cette stratégie équivalait en réalité à une occupation militaire du territoire libanais par des milices chrétiennes maronites d'extrême droite, chargées de l'essentiel du travail par l'intermédiaire de l'autoproclamée « Armée du Sud-Liban » (ALS).
En 1967, Israël occupa illégalement le plateau du Golan depuis la Syrie, ce qui déclencha des violences intermittentes entre les deux camps. Les forces israéliennes envoyaient régulièrement des colons et des véhicules militaires plus profondément en territoire syrien, tentant ainsi d'étendre leur contrôle territorial. L'ancien ministre israélien de la Défense, Moshe Dayan, a même admis qu' « Israël pouvait être tenu responsable de plus de 80 % des incidents qui ont attisé les tensions autour des zones démilitarisées entre Israël et la Syrie avant la guerre de 1967 ». Pendant la « guerre d'octobre » de 1973, lancée par la Syrie et l'Égypte pour reprendre leurs territoires occupés à Israël, lorsque la situation militaire commença à changer après que Washington eut commencé à aider ses alliés à Tel-Aviv, les forces israéliennes s'enfoncèrent encore plus profondément en territoire syrien. Cette situation poussa même le président irakien Saddam Hussein à envoyer son armée en renfort à Damas, la situation devenant critique pour l'ancien président syrien Hafez el-Assad. Israël a ensuite annexé le plateau du Golan, ce qui a été rejeté par la communauté internationale, qui l'a jugé illégal en adoptant la résolution 497 du Conseil de sécurité des Nations Unies . Malgré cette condamnation, Tel-Aviv n'a jamais été punie pour avoir violé cette résolution contraignante.
« Il n’existe absolument aucune base en droit international pour désarmer de manière préventive un pays que vous n’aimez pas. »
Des experts de l'ONU ont déclaré mercredi que les récentes frappes israéliennes contre la Syrie violaient le droit international. pic.twitter.com/HzBrxn6r27 — Middle East Eye (@MiddleEastEye) 12 décembre 2024
La guerre en Syrie, qui a débuté en 2011, a offert aux Israéliens une nouvelle opportunité de revendiquer des territoires qui consolideraient leur contrôle sur le plateau du Golan, riche en ressources. En 2013, alors qu'il prévoyait de sécuriser une nouvelle zone tampon dans le sud de la Syrie, Israël a commencé à soutenir au moins une douzaine de groupes d'opposition qui combattaient l'Armée arabe syrienne (AAS). Ce soutien s'est traduit par le soutien à son propre groupe mandataire, « Forsan al-Julan », et par la fourniture d'armes légères, d'aide médicale et d'un soutien financier à diverses autres milices armées, dont le Front al-Nosra. Ces dernières années, les Israéliens ont cherché à nouer des contacts avec des groupes appartenant à la minorité religieuse druze du sud de la Syrie, allant même jusqu'à soumettre à Moscou des propositions visant à créer un État druze syrien frontalier d'Israël. Le parti syrien Liwa, dirigé par les Druzes, a ensuite émergé de la région de Soueida en 2020, ouvrant rapidement une ligne de contact avec les États-Unis et cherchant à séparer le sud de la Syrie du reste du pays. Les chars israéliens continuent de progresser en territoire syrien, sans rencontrer de résistance de la part du nouveau gouvernement de Damas. Ce dernier n'a toujours pas réagi à l'invasion israélienne ni aux centaines de frappes aériennes menées sur le territoire syrien. Il semble que l'objectif longtemps recherché par Israël d'étendre son occupation en Syrie ait, pour l'instant, été atteint. Photo de couverture | Des Druzes syriens observent un véhicule blindé israélien franchir la barrière de sécurité pour rejoindre la ligne Alpha, qui sépare le plateau du Golan annexé par Israël de la Syrie, dans la ville de Majdal Shams, le 8 décembre 2024. Matias Delacroix | AP. Robert Inlakesh est analyste politique, journaliste et documentariste basé à Londres, au Royaume-Uni. Il a vécu et couvert les territoires palestiniens occupés et anime l'émission « Palestine Files ». Réalisateur de « Steal of the Century : Trump's Palestine-Israel Catastrophe ». Suivez-le sur Twitter : @falasteen47